Enfin un débat
Les électeurs ont rejeté le traité constitutionnel et sa philosophie néolibérale, dont une majorité des électeurs de gauche traditionnels ((71 % des ouvriers, 66 % des employés). Les positions nationalistes et d’extrême droite ont été minorisées même si elles restent présentes et dangereuses dans l’ensemble de l’opinion (questions de l’immigration et de la Turquie). Les altermondialistes ont refusé d’être enfermés dans le dilemme pour ou contre l’Europe en affirmant leur volonté de construire une autre Europe. En fait, le débat a largement porté sur les réformes néolibérales organisant l’injustice sociale et renforçant les inégalités. Le refus des électeurs a été le refus de ces réformes, en même temps que celui d’une certaine « classe politique » et des « élites ». En cela la mobilisation en France prolonge la vague des mouvements de 1994 et 1995 qui avaient en Italie, en France et en Allemagne, marqué un coup d’arrêt des remises en cause des systèmes de protection sociale, la prise de conscience des politiques de précarisation et l’émergence d’une nouvelle phase de l’altermondialisation.
Le roi est nu
Le non des masses révèle la crise de l’Europe, malmené par ses élites qui voient l’européanisation ou l’harmonisation comme un moyen pour attaquer les acquis sociaux, une sorte de dumping social et fiscal. Parallèlement, l’Europe officielle choisit l’ancrage géopolitique dans le bloc dominant sous hégémonie américaine. On vient de le voir avec l’« acceptation » par l’Europe de Paul Wolfowitz (chef des néoconservateurs américains) à la Banque mondiale en « échange » de la nomination du très néolibéral français Lamy à la tête de l’OMC. À cette Europe-Là, on dit non. Maintenant que le travail a été fait, il nous revient de participer à la définition avec les peuples européens, avec les peuples du monde, d’une Europe solidaire, démocratique, sociale, écologique, indépendante et internationaliste.