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Évolution de la dette externe du Tiers Monde au cours de l’année 2008

Mercredi 22 juillet 2009, par Gladys Cecilia Hernández Pedraza

13 juillet 2009

Au cours des dernières années, le processus d’endettement dans les pays en voie de développement (PED) a atteint de nouvelles et dangereuses dimensions. Malgré les multiples tentatives des Institutions Financières Internationales (IFI) pour passer sous silence les diverses manifestations de ce nouveau type d’endettement, l’accumulation des anciennes pressions financières et les impacts de la crise globale actuelle, confèrent à ce problème une connotation spéciale.

Après de nombreuses tentatives pour limiter l’importance du phénomène, voire, adopter quelques mesures, comme l’initiative PPTE et ses promesses d’annuler 68 milliards de dollars de dette multilatérale des Pays Pauvres Très Endettés, beaucoup de gouvernements créanciers ont développé une certaine tendance à décrire l’annulation de dette comme quelque chose « déjà réalisé » et ont tenté de dévier l’attention du phénomène et de ses causes structurelles, déviant le débat rapidement vers : comment éviter une nouvelle accumulation de dette insoutenable.

Le premier élément qui fait débat dans ce contexte est, sans aucun doute, de savoir à quel point le processus de réduction de dette externe a été réaliste et effectif, et dans un deuxième temps, savoir si finalement l’objectif a été atteint, pourquoi paraît-il si nécessaire d’éviter un nouveau processus d’endettement. Ne serait-ce pas parce que les causes structurelles qui provoquent le phénomène n’ont pas été éliminées ?

Ces derniers facteurs incitent à la réflexion sur la raison pour laquelle les pays atteignent des niveaux d’endettement si élevés. Nous savons déjà depuis plusieurs générations que les pays débiteurs accumulent de tels volumes de dettes qui ne peuvent être payés sans compromettre la survie de leurs populations.

De nouveaux éléments dans le panorama de l’endettement externe

Pendant des années, plusieurs éléments ont été mis en avant comme causes principales pour l’actuelle crise de la dette des PED, initiée dans les années 80. Ces causes incluent la chute des prix des matières premières, l’augmentation unilatérale des taux d’intérêts et le processus d’appréciation du dollar. La conjugaison simultanée de tels facteurs a compromis la position fiscale de beaucoup de gouvernement et leur balance des paiements, les forçant à contracter de nouveaux prêts afin de rembourser les anciens.

Le rôle joué, historiquement, par les banques occidentales, critiquées sévèrement depuis plus de trois décennies pour avoir ignoré les signaux d’une crise de la dette imminente, contribuant à fragiliser la situation débitrice de beaucoup de pays, s’avère aujourd’hui bien plus évident à la lumière des arguments qui qualifient de telles attitudes. En effet, ces arguments ont promu des mécanismes irresponsables comme le refinancement de prêts à une date proche de leur échéance avec des prêts à plus court terme, spécialement dans des conditions objectives d’impayés, à des gouvernements corrompus et avec comme intention claire de continuer à alimenter le cercle vicieux de l’exploitation coloniale dans l’ère moderne.
Sans doute aujourd’hui trouvons nous de l’emphase, dans l’échec de l’éthique et de la responsabilité financière des principaux agents du système monétaire et financier international, les banques et les différentes institutions financières impliquées, comme une des causes déterminantes de la crise qui a conduit à la destruction de tant de richesses.

Cette crise reprend des éléments d’éthique, de transparence et de confiance qui se sont perdus tout au long de l’histoire du système capitaliste. L’Eglise catholique à l’époque féodale fût capable de vendre ses indulgences, de la même manière que les banquiers et les agents financiers accordèrent de multiples et divers crédits aux PED, dans leur soif de reproduire la richesse engendrée par les pétrodollars dans les années 70, ou en vendant de façon irresponsable les produits financiers toxiques à des acheteurs innocents dans l’actuelle décennie.

Ces facteurs dessinent un panorama négatif pour l’évolution de la dette externe dans les PED.
Quand on se souvient des facteurs qui donnèrent lieu à la crise de la dette, cette combinaison d’augmentation des taux d’intérêt appliquées par les Etats-Unis et la chute des prix des matières premières, à commencer par le pétrole, cela devrait attirer notre attention sur le panorama changeant de ces variables durant l’année 2008 (Voir Annexe I)

Tout au long de l’année, des taux d’intérêt bas ont été maintenus, y compris dans les principales économies développées, et en fin d’année, on observait une impressionnante tendance à une baisse majeure de ces taux. Les Etats-Unis ont initié la politique de baisse toujours plus grande des taux d’intérêts, depuis la fin de 2007, devant les craintes de récession pour l’année 2008 et l’incertitude autour de l’inflation qui pourrait déboucher sur une menace sérieuse de déflation déjà plus claire en 2009. (BOE, 2009 ; Econ Stats ; 2009).

Avec le recul, on observe que l’Europe et le Japon ont aussi initié une politique monétaire similaire qui a porté les taux d’intérêt officiels à des niveaux extrêmement bas. Déjà en Janvier 2009, le taux d’intérêt de la Federal Reserve des Etats-Unis était de 0,25% et celui de la Banque d’Angleterre était de 1,5%, se situant chacun au niveau le plus bas, sur l’ensemble des taux connus depuis la création respective de ces institutions en 1913 et 1694. (BOE,2009 ; Econ Stats ; 2009)

Les tentatives de la Federal Reserve pour diminuer le taux d’intérêt et le processus d’appréciation du dollar observé jusqu’aux premiers mois de 2009 avaient, apparemment créée une situation favorable pour le thème de la dette externe (Toussaint, 2009). Cependant, cette situation ne devrait pas se maintenir et, de fait, la contraction du crédit au niveau international aggrave dramatiquement les conditions pour les nouveaux prêts, de tous types, commerciaux, de refinancement…

Pour ce qui a trait aux prix des matières premières, la situation s’avère aussi être différente. L’augmentation des prix des produits de base observée depuis le début de la décennie, a été constatée fondamentalement dans le cas d’une part des minerais, minerais métallifères, métaux et d’autre part du pétrole brut, qui enregistrèrent une augmentation annuelle de 41% et 27% respectivement entre 2003 et 2006. L’indice de prix des minerais et des métaux a atteint des niveaux sans précédents en 2006 (près de 240% de la moyenne annuelle pour la période 2000-2005.) (CNUCED,.2007)
Ces prix continuèrent leur solide ascension jusqu’au premier semestre 2008. Cependant, depuis la mi-Novembre, les prix commencèrent à baisser, et cette baisse était accompagnée de la perte des opportunités engendrées par la majorité des augmentations du premier semestre de l’année.
La chute subite n’est rien d’autre que le reflet des impacts provoqués par la décélération de la croissance mondiale (Voir Annexe I et II)

En Juillet 2008, les prix de l’énergie, libellés en dollars, avaient augmenté de 80% par rapport à l’année antérieure, tandis que pour les prix des produits de base, en dehors de l’énergie, l’augmentation avait été de 35%. (BM,2009)
En 2008, presque toutes les augmentations, des prix des produits de base, à l’exception de l’énergie, étaient provoquées par les céréales (60%), les graisses et les huiles (34%) et les engrais (140%). Quant aux prix des métaux, qui avaient rapidement augmenté entre 2003 et 2008, l’augmentation au premier semestre 2008 était seulement de 8% (BM,2009). On peut donc dire que la quasi-totalité des prix des produits de base a atteint un pic au début voire mi 2008 et la majorité a rechuté considérablement depuis. (BM, 2009)
Les prix du pétrole brut chutèrent de 143 dollars le baril au début Juillet, à moins de 50 dollars le baril au milieu du mois de Novembre. La chute du prix peut trouver ses causes dans la diminution de la demande enregistrée dans les pays membres de l’OCDE, l’appréciation du dollar dans la deuxième moitié de 2008 et l’incertitude, à ce moment là, autour de la crise financière.

Automatiquement, la chute dramatique dans les prix du pétrole brut provoqua une baisse du reste des produits de base, fondamentalement à cause de la relation existant entre ces marchés, à travers les coûts de production. D’autres causes sont liées à la contraction de la demande provenant des pays émergeants, comme la Chine, l’Inde et le Brésil, ainsi qu’aux changements dans la structure du marché énergétique suite à l’essor des agrocombustibles. (Annexe I et II)
La récession mondiale a aussi eu un impact sur les exportations de produits manufacturés. La Chine spécialement a connu des difficultés dans ce secteur. En 2008, le commerce de textiles et de tissus, comprenant la confection, les produits textiles, des ornements et des accessoires, représentait 185 milliards de dollars pour la Chine et reflétaient une augmentation de 8,2% par rapport à 2007, cependant, ce taux de croissance a été inférieur de 10,7 points de pourcentage à celui de l’année antérieure. (Gouvernement chinois, 2009)

On peut affirmer que la conjoncture qui favorisait les PED exportateurs de ces produits de base, y compris quelques produits manufacturés, qui avait permis d’accumuler des excédents commerciaux importants dans l’actuelle décennie, a remarquablement changé. (Voir Annexe I)

Le cas de la Chine constitue un exemple dans ce sens. L’excédent commercial de la Chine a crû de 47,7% en 2007 et avait dépassé les 260 milliards de dollars, un chiffre record (Pueblo en Linea, 2008). Néanmoins, en 2008, l’excédent commercial avait seulement augmenté de 32 millions de dollars et la croissance du commerce extérieur s’arrêta à seulement 17% par rapport à l’année précédente. (Gouvernement chinois, 2009a)

On peut aussi affirmer que les PED exportateurs de pétrole, gaz et minéraux, et de produits manufacturés, qui avaient accumulé d’importantes réserves de devises internationales les verront probablement diminuer, à mesure qu’ils devront affronter d’autres programmes d’urgence pour faire face à la crise.
En Décembre 2007, la Chine, Hong Kong, la Russie, la Corée du Sud, l’Inde et le Brésil possédaient 40% des réserves de devises internationales. Sur l’ensemble des devises, répertoriées dans le monde représentant à peu près 6 000 milliards de dollars, 4 600 milliards de dollars appartenaient aux PED. (COFER,2007)
Pour le troisième trimestre de 2008, les réserves internationales répertoriées tournaient autour de 6 800 milliards de dollars, dont 5 300 milliards de dollars dans les PED. Dans la période comprise entre 1999 et 2008 les réserves exprimées en dollars sont passées de 71% à 62,5% pendant que celles exprimées en Euros augmentaient de 18% à 27% (COFER,2009).

Cependant, les impacts relatifs au commerce international et la chute dans les flux de capitaux, affectent probablement ces volumes de réserves. De plus, il faut prendre en compte les fluctuations dans les taux de change qui, aussi, affectent la composition des réserves.

Pour la Chine, premier pays détenteur de réserves internationales, une telle situation doit être prise en compte. Les réserves de la Chine, les plus grandes du monde, totalisent 1 946 milliards de dollars fin Décembre 2008, la date la plus récente pour laquelle des chiffres officiels sont disponibles. (Bureau National des Statistiques, 2009). Les données des réserves au premier trimestre, doivent être publiées en Avril.

Une diminution soutenue des réserves signifierait que la Chine dispose de moins d’argent à destiner aux bons du trésor des Etats-Unis, à un moment où, pour le gouvernement des Etats-Unis, il semble déterminant d’accélérer les émissions de dettes. De plus, il semble logique de penser que les autorités chinoises sont préoccupées par la sécurité des actifs chinois aux Etats-Unis.

Les réserves chinoises peuvent déjà être affectées par les différents impacts provoqués par la crise. En premier lieu, par la contraction du commerce extérieur à laquelle s’ajoute les fluctuations monétaires. Au début de la crise, on pouvait observer la hausse du dollar grâce à la demande d’un refuge sûr et le rapatriement des fonds des banques, compagnies et d’investisseurs touchés par la crise. De fait, l’appréciation du dollar réduit la valeur des actifs non libellés en dollars. Tel est le cas de l’Euro, en effet on a pu observer que parti d’un maximum de 1,4146 dollars enregistré le 31 Décembre, l’Euro a baissé à 1,2775 dollars le 30 Janvier. Dans ce sens, les réserves libellées en Euros ont vu diminuer leur valeur.
L’autre facteur présent dans la conjoncture internationale actuelle et qui aura sans aucun doute un effet sur le processus d’endettement externe du monde en développement est la possible rétraction des niveaux de commerce international. La Banque Mondiale a prévu une décélération prononcée du commerce mondial à partir d’une baisse de 2,1% du volume de ses exportations, ce qui impliquerait son premier recul en 27 ans, sa première contraction depuis 1982. (BM, 2009)

Il en ressort de manière évidente que les niches commerciales pour les PED fondent comme neige au soleil au fur et à mesure que s’aggrave la récession dans les pays développés. Celle-ci contribuera aussi la disparition des crédits à l’export et le renchérissement des assurances d’exportation. De plus, le mouvement dans les flux mondiaux de capitaux s’est inversé, fondamentalement, comme conséquence des énormes pertes observées sur les marchés financiers.
Au cours du deuxième trimestre de 2008, bien des marchés financiers dans les PED observaient une augmentation des capitaux à risques provenant des pays développés affectés par la crise financière, spécialement des Etats-Unis. Cependant cette tendance fût de très courte durée (Toussaint, 2009)
Après une période de près de 2 ans (2007-2008), pendant laquelle beaucoup des marchés émergeants ont fait face à l’arrivée de montants importants de flux de capitaux, cette tendance semble s’être actuellement inversée. On s’attend à une réduction de 50% des flux privés par rapport à l’année 2007. Les flux nets de capitaux privés destinés aux PED sont passés de approximativement, 1000 milliards en 2007 à 530 milliards en 2009, ce qui implique une réduction du PIB de 7 ,7% à 3%. (BM, 2009)

Une telle situation placera de fortes pressions sur les monnaies nationales et les économies des pays impliquées, spécialement pour celles qui se sont reposées sur ces flux pour financer leur déficit fiscal et dont la balance des paiements est particulièrement vulnérable.

De plus, l’inversion de la tendance pourrait aussi déchaîner, ce qui semblerait logique, un renforcement des contrôles et de la protection sur les marchés émergeants.

Si l’on prend en compte que la crise de 1982 a éclaté, précisément, suite aux restrictions sévères en matière de crédit pour les PED, il ne paraît pas utopique de penser que le phénomène puisse se répéter, y compris parce que les conditions de départ sont actuellement beaucoup plus complexes. D’une part, les conditions de solidité financières relative, garanties par le commerce extérieur ou le volume de réserves internationales accumulées, ne seront déjà plus les mêmes et ce, en conséquence de leur éminent caractère conjoncturel.

De plus, comme il a été signalé, la contraction du crédit aggrave les conditions pour les nouveaux prêts, ajoutant de la vulnérabilité et de la fragilité aux conditions financières des pays fortement endettés et éprouvant des difficultés de paiements.

Évolution de la Dette Externe et de la Dette Interne.

Dette externe
Selon les chiffres du FMI d’Octobre 2008, le montant de la dette externe des PED s’est maintenu autour de 2 700 milliards de dollars |1|. (WEO,2008)
De manière croissante, la tendance à l’endettement s’est maintenue dans les régions telles que l’Asie et l’Europe Centrale et Orientale, ainsi que dans la Communauté des Etats Indépendants (CEI). Durant l’année 2008 on a pu observer cette tendance qui tendra à augmenter en 2009 suite au développement des prêts dirigés vers ces régions, spécialement vers les pays considérés en transition et vers les pays émergeants d’Asie.
Cette situation se reflète dans la place des régions dans l’endettement total. Pendant que l’Afrique et l’Amérique Latine ont diminué leur part relative dans l’endettement, d’autres régions ont augmenté le montant de leur dette externe. Pour 2008, les régions participaient au total de l’endettement de manière suivante : l’Afrique représentait 5,7% ; l’Asie 25,1% ; le Moyen-Orient 9,2% ; l’Europe de l’Est 23,3% ; la Communauté des Etats Indépendants 16,7% et l’Amérique Latine 19,8%. (WEO,2008)

Les calculs effectués révèlent que durant la période 1986-2008, les PED ont payé 5 800 milliards de dollars au titre du service de la dette, ce qui fait une moyenne annuelle d’à peu près 268 milliards de dollars. (WEO,2008)

Rien qu’entre 2000 et 2008, le Tiers-Monde a payé 3 100 milliards de dollars au titre de service de la dette, ce qui donne une moyenne annuelle de 350 milliards de dollars. (WEO,2008)

La croissance de la dette expérimentée dans les pays de l’Europe Centrale et Orientale et de la CEI paraît remarquable. Dans la période comprise entre 1995 et 2008, ces régions ont déjà payé au titre d’intérêt, autour de 1 900 milliards de dollars et leur dette totale est de 2 800 milliards de dollars. (WEO,2008)

Les nouvelles conditions dans la conjoncture internationale aiguisent la crise sociale et économique déjà provoquée par le fouet de la Dette Externe. Jusqu’en 2008, aucune des initiatives développées par les créanciers n’a donné de solution à ce problème.

L’initiative pour la réduction de la dette externe dans les Pays Pauvres Très Endettés (PPTE)
apporte peu de résultats et souvent peu pertinents. Jusqu’à maintenant, seuls 41 pays sont catalogués comme éligibles ou potentiellement éligibles pour cette initiative, 23 pays reçoivent un allègement de dette par le FMI et d’autres créanciers. Neuf pays ont atteint le point de décision et commencent à recevoir quelque allègement de dette jusqu’à ce que débute la nouvelle étape et 9 nouveaux pays ont été identifiés. (FMI, 2007, 2008) (Voir Annexe IV, V, VI)

Cependant, le montant total destiné à l’initiative PPTE est estimé à 68 milliards de dollars. La moitié des ressources provient des créanciers bilatéraux et le reste provient des Institutions.
Les paquets d’allègements de dettes approuvés concernent 33 pays, dont 26 pays africains et représentent 46 milliards de échelonnés sur plusieurs années. Ce montant s’avère être insignifiant, surtout lorsqu’on le compare aux 30 milliards de dollars en moyenne, payé annuellement au titre de service de la dette par l’Afrique entre 1990 et 2008. (WEO, 2008)
Dans les conditions actuelles de la crise globale, les conséquences peuvent devenir plus graves encore pour l’endettement externe des pays du Tiers-Monde.

Dette Interne

Depuis le milieu des années 90, la dette publique dans les PED augmente. Entre 2000 et 2008, cette dette a atteint un niveau important dans les pays à revenus intermédiaires. Au début de la décennie actuelle, cette tendance s’est aggravée, ce qui ajoute des éléments potentiels de détérioration additionnelle au niveau de vie de ces populations.

Selon les estimations de la Banque Mondiale, durant la période 2005-2007, la dette publique interne des PED a triplé, passant de 1 300 milliards de dollars à 2 500 milliards de dollars, ce qui représente 2,5 fois le montant de la dette externe du Tiers-Monde, qui, en 2005 avait déjà atteint les 1 400 milliards de dollars. De plus, le paiement au titre de service de la dette publique interne s’élevait en 2007 à 600 milliards c’est-à-dire le triple de ce qui était payé au nom de service de la dette externe. (World Bank, 2006 ; Toussaint, 2009)
Si on ajoute les montants payés au titre de service de la dette publique interne et ceux au service de la dette publique externe on observe que le montant dépasse la valeur astronomique de 800 milliards de dollars, un chiffre comparable au total de la dette externe de l’Amérique Latine en 2008 (Toussaint, 2009, WEO, 2008)

Le Fond Monétaire International et la crise globale

La crise globale représente un énorme défi pour le FMI. Il est admis que cette institution n’est pas en condition de pouvoir financer les Etats-Unis ou quelconque autre pays développé touché de plein fouet par la crise, à l’exception peut être de l’Islande.

En Août 2008, le FMI disposait d’un montant de ressources financières évalué à 352 milliards de dollars, desquels 257 milliards étaient des ressources disponibles. La plus grande valeur de prêts enregistrés par le FMI était de 30 milliards, pour les 4 trimestres de 1998, quand la crise financière asiatique était à son apogée. (IMF, 2008c)

Au cours de la crise financière en Argentine, Brésil, Uruguay et Turquie, entre juin 2001-2003, le FMI prêta autour de 40 milliards de dollars. La dernière fois que les pays développés ont frappé aux portes du FMI c’était entre 1976 et 1978, quand la Grande-Bretagne, l’Italie et l’Espagne durent faire appel au FMI afin d’affronter la crise dû à l’augmentation de prix du pétrole. (IMF, 2008c)

L’expansion des flux financiers et commerciaux, auquel s’ajoutait l’accumulation des énormes volumes de réserves internationales a provoqué la diminution de la demande de prêts en provenance du FMI, ce qui affaibli sa position budgétaire. En 2003, le FMI révéla un solde exceptionnel de 110 milliards de prêts alors que le 30 Septembre 2008 ceux-ci avaient diminué de 92,6 milliards de dollars et se trouvaient autour de 17,72 milliards de dollars. Ce qui rend compréhensible la proposition du Fonds de vendre une partie de ses réserves en or. (IFM, 2008c)

Beaucoup de pays soutiennent aujourd’hui que le FMI, dans son état actuel, n’est plus représentatif des tendances qui se sont opérées récemment à l’échelle globale. Plusieurs pays, particulièrement dans le Sud Est Asiatique et en Amérique Latine, ont avancé qu’il fallait transformer le système de quota afin de véritablement refléter le nouveau rôle dans l’économie mondiale qu’occupent les pays émergeants.

Cependant, la crise lui a conféré une nouvelle opportunité pour pouvoir renaître (de ses cendres) tel un phénix. Sans doute les nouveaux prêts créeront de nouveaux liens.

L’exemple récent de l’Islande est à ce titre emblématique. La situation islandaise est tellement grave que le gouvernement a sollicité l’aide du FMI en même temps qu’il sollicitait un prêt de 4 milliards de dollars auprès de la Russie. Le pays est passé, du jour au lendemain, d’un état de pays prospère à un état de chaos financier, ce qui à généré un énorme déboussolement auprès de ses 300 000 habitants. Les autorités ont nationalisé des banques comme Kaupthing Landsbanki et Glitnir. On sait aujourd’hui que le volume de négoce de ces entités, au cours des dernières années, avait multiplié par 10 le PIB du pays. Le pays avait changé au cours des deux dernières décennies. En 2003, les marchés financiers étaient dérégulés et les banques privatisées, ce qui a entraîné un mouvement de capitaux très fort et permis aux entités financières de croître à l’extérieur. Quelques experts expliquent la conquête des marchés en Grande-Bretagne par les banques mentionnées, grâce au fait qu’elle offraient des intérêts supérieurs de plus de 10%, captant ainsi l’épargne britannique.

Déjà en Mars 2006, les coûts des Fonds de garanties des dépôts privés pour les banques Landsbanki et Kaupthing étaient bien supérieurs - respectivement 6% et 8,5% - aux autres banques européennes. Le 14 Octobre 2008 se produisait le crash de la bourse islandaise, avec une chute de 77% en une journée. Les trois banques privées signalées, ont perdu pratiquement toute leur valeur boursière. (The Wall Street Journal, 2008)
Le 20 Novembre 2008 le conseil d’administration du FMI approuvait un prêt de 2,1 milliards de dollars pour l’Islande. Le pays recevrait un crédit immédiat de 827 millions de dollars et le montant restant se diviserait par paquets de 155 millions de dollars tous les 2 ans. (El Pais.com, 2008)
Le paquet du FMI, est le premier concédé à un pays de l’Europe Occidentale. Le seul antécédent similaire est le paquet de sauvetage à la Grande-Bretagne en 1976. Les conditions pour le paquet de l’Islande sont les conditions traditionnelles et comprennent l’augmentation des taux d’intérêts, la réduction de dépenses du gouvernement. Des paramètres identiques à ceux employés pour les économies d’Amérique Latine dans les années 80 ou en Asie en 1997-1998, et comme il a été prouvé dans les cas antérieurs, les impacts dérivés de leur application approfondiront seulement la récession.
Après l’accord initial avec le FMI, l’Islande éleva ses taux d’intérêts de 12% à 18% pour tenter de renforcer la devise. La dernière fois que la Sedlabanki avait rabaissée les taux d’intérêts était en Octobre 2008, quand elle les baissait de 3,5% afin qu’ils se situent autour de 12%. Cependant, avec l’accord du FMI ils remontent. Avec cette proposition, on a vu s’élever le prix des prêts pour les familles et les entreprises nationales, déjà rendus vulnérables par le processus de dévaluation, occasionné par la fuite des capitaux vers d’autres monnaies. (Expansion.com, 2009)

Deux mois après l’accord avec le FMI et en conséquences du mécontentement social et des protestations, la faillite économique entraîna la démission du gouvernement islandais le 26 janvier 2009, en conséquences de quoi se forma un autre gouvernement provisoire de coalition avec à sa tête la sociale démocrate Jóhanna Sigurdardóttir, qui a dirigé le pays jusqu’à la tenue des élections le 25 avril.

Le 18 mars 2009, la Banque Centrale d’Islande (Sedlabanki) baissa les taux d’intérêt de 1% pour atteindre un taux de 17%, ce qui fut la première baisse effectuée en cinq mois, depuis l’octroi du crédit avec le FMI. (Expansion.com)

Cependant les prêts du FMI ont continué leur transit par l’Europe de l’Est. Le FMI a conclu des négociations avec la Hongrie en octobre 2008, accordant un montant de 16 milliards de dollars et exigeant des autorités d’appliquer de profondes réductions des dépenses budgétaires. De plus, les employés du secteur public ne recevront pas leur prime annuelle, représentant presque 8% de leur salaire, salaire qui sera gelé à son niveau d’alors au moment de la signature avec le FMI. Comme si cela ne suffisait pas, le système des pensions subira aussi de sévères baisses, au moment même où les autorités se sont engagées à ne pas diminuer les impôts. (IMF, 2008b)

Ces promesses ont été faites par le gouvernement de Hongrie dans la lettre d’intention au FMI. La conditionnalité officielle du FMI en cette occasion paraissait minime, mais incluait des objectifs standard en ce qui concerne l’inflation et le paiement de la dette externe, comme par exemple des restrictions de l’équilibre fiscal en général. Cependant, Laszló Andor, le fonctionnaire hongrois désigné pour prendre part aux négociations à la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement, déclara à ce sujet là : « Quand le FMI impose ses conditions strictes, les pré requis pour la consolidation se tournent alors inévitablement vers l’économie réelle et les conséquences sociales. » (Brettonwoodsproject, 2009).

Le montant octroyé à la Hongrie alors dans une situation peu stable a été complété par plus de 8 milliards de dollars de prêts par l’Union Européenne. La situation dans le pays ne fut pas très stable. De fait, le FMI parait s’être rétracté sur une de ses conditions les plus strictes dans le cas de la Hongrie, puisqu’à partir de l’augmentation rapide des taux d’intérêts, de la dévaluation de la monnaie et du prêt conséquent du FMI l’année passée, le pays fit face à une dévaluation de 22% de sa monnaie en janvier 2009 et les autorités décidèrent de dédommager les travailleurs du secteur public qui étaient sur le point de perdre leurs primes annuelles.

L’Ukraine arriva à un accord avec le FMI en novembre pour un montant de 16,5 milliards de dollars et bien qu’il ne soit pas possible de se procurer la lettre d’intention liée à ce prêt, le représentant permanent du FMI fit remarquer à la presse que le déficit fiscal gouvernemental se limitera à 1% en 2008, inférieur de 1% au plan originel, et devra être éliminé en 2009. (Brettonwoodsproject, 2009)

Un autre pays de la région, la Serbie, signa également un accord « Stand-By » avec le FMI en novembre, pour une valeur de 500 millions de dollars. L’accord comprend la promesse de la part des autorités serbes de maintenir son déficit fiscal pour 2009 de 1,5% du PIB, alors qu’il était de 2,7% en 2008. (Brettonwoodsprojects, 2009)

La Biélorussie a signé un prêt de 2,5 milliards de dollars avec le FMI mi janvier 2009, et a procédé de ce fait à une dévaluation de 25% de sa monnaie. Les notes de presse du FMI révèlent que : « L’objectif des mesures de durcissement fiscal est dirigé spécialement vers la réduction de l’investissement et de la consommation. L’augmentation des salaires sera lente et l’investissement public sera contraint. » Il est ajouté que « le programme considère la libéralisation économique comme une priorité ». (Brettonwoodsproject, 2009).

Le panorama du groupe de pays considérés à bas revenus est vraiment dramatique. Fin 2008, le Malawi contracta un prêt auprès du Fonds d’appui économique de 77 millions, le Sénégal de 75 millions, les Comores convinrent d’un accord de 3 millions de dollars, et la République du Kirghizistan un de 100 millions de dollars.

La crise et le FMI

Précédemment la crise, les doutes en ce qui concerne les politiques du FMI et ses réelles capacités à faire face à la crise étaient importants. Alors que des protestations mondiales revendiquent la nécessité d’une réforme majeure du Système Monétaire Financier International et de ses institutions, c’est à ce moment là que le FMI se renforce.

Le Conseil Exécutif du FMI approuva une importante révision du cadre de prêt de l’organisme qui inclut la création d’une nouvelle ligne de crédit : la Ligne de Crédit Flexible (FCL), outil par lequel le FMI prétend assumer les prêts avec l’hypothétique objectif d’éviter que la crise n’empire dans les pays où les politiques et l’histoire financière sont « très solides ». (El Mundo, 2009).

Evidemment, il est impossible d’éviter dans ce contexte les conditionnalités. L’accès à la FCL sera déterminé « cas par cas » et non par « le programme traditionnel » du FMI. Cet accès flexible sera justifié « par la solidité historique des pays » dont les politiques économiques devront être « solides » et de « confiance ». (El Mundo, 2009).

Tous les pays ne pourront avoir accès à cette ligne de crédit. Seuls ceux qui remplissent les paramètres et les exigences du FMI, dans ce cas, seulement ceux considérés comme émergents et dont les performances économiques ces dernières années ont été relativement meilleures. Ils devront être par conséquent, en bon leader, en meilleures conditions pour faire face à la crise actuelle. Mais il n’a jamais été question de prendre en considération les pays dont la situation est vraiment désastreuse.

Cette nouvelle ligne de crédit remplace le programme de Facilités de Liquidités à Court Terme (SLF), qui était beaucoup plus limité en ce qui concerne sa période de remboursement. Le FCL ne fixe pas de limite d’accès aux fonds et établit jusqu’à cinq ans la période de remboursement, par rapport aux neuf mois pour la SLF. L’idée du FMI est que « le concept d’une ligne de crédit disponible pour prévenir n’importe quelle crise, réservé seulement aux pays avec des fondamentaux très solides, et avec toutes ses caractéristiques flexibles, est nouveau ». (El Mundo, 2009).

Plusieurs mois avant cette décision, certains pays comme la Hongrie, la Lettonie, l’Ukraine, la Serbie, l’Islande et la Biélorussie ont fait appel au FMI pour obtenir des prêts de dernier recours puisque leurs économies connaissaient des chocs dus à la crise globale.

Malheureusement, les programmes conçus par le FMI pour faire face à la crise financière montrèrent que la conditionnalité la plus importante traditionnellement demandée par le FMI et en référence à l’indispensable ajustement fiscal, pour la plupart des candidats aux prêts, continuent d’être en tête de liste au moment de concéder les crédits.

Même si fin 2008, on pouvait observer certains mouvements dans ce sens, et sachant que le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, avait demandé un processus de révision de tous les instruments de prêts et de la conditionnalité, beaucoup d’experts ont assurés que ces révisions avaient été réalisées de manière précipité et sans grande transparence.

La révision de la conditionnalité du FMI doit être discuté par l’Assemblée au premier trimestre 2009. Le premier argument flagrant est que ce processus analysera seulement la conditionnalité des prêts du FMI avec les pays à revenus intermédiaires. Il ne faut pas oublier que la dernière révision de la conditionnalité entreprise par le FMI dans la période 2001 et 2003, fut peu transparente, sans consultation publique, et ne donna pas la possibilité aux acteurs externes d’en discuter. (IMF, 2008a).

Avec cette révision de la conditionnalité, deux brèves consultations ont été instaurées fin 2008, pour lesquelles une page Internet, un numéro de téléphone, et une adresse mail ont été créés pour permettre l’envoi des commentaires. (Brettonwoodsproject, 2009).

Bien qu’il semble évident que les conditions des prêts ne peuvent pas être analysées de la même manière dans les pays à revenus intermédiaires et dans les pays à faible revenu, dans la réalité, la conditionnalité des pays à faible revenu continue d’être exacerbée, tout comme on considère que le FMI doit maintenir son rôle de prêteur à moyen terme envers les pays les plus pauvres. (Brettonwoodsproject, 2009).

En ce sens, le durcissement des conditions, déjà régulièrement critiquées, des prêts pourrait affecter encore plus les pays impliqués, et surtout avec les conditions actuelles. Quelques ONG répondirent à la proposition offerte. Oxfam international, par exemple, pria instamment le FMI qu’il « révise les grandes lignes des conditions actuelles » pour qu’il lâche la pression en ce qui concerne la privatisation, la libéralisation du commerce et les plafonds des comptes des salaires du secteur public ». (Brettonwoodsproject, 2009)

Mais alors que se développent ces révisions, le FMI a continué de concéder des prêts durant la crise à des conditions extrêmement dures. Dans la plupart des cas, les nouveaux prêts ont été délivrés à des pays qui ne se trouvaient pas parmi les plus pauvres de la planète, ce qui a de plus, conféré des éléments nouveaux à ce processus.

Conclusions

L’année 2009 paraît déterminante dans le contexte actuel de la dette externe. Les phénomènes actuels liés à la crise globale ont ajouté vulnérabilité et incertitude à cet ancien fardeau. Alors que ces dernières années, pour faire face au paiement de la dette, des moyens se sont développés, mais dans le contexte actuel de nombreux facteurs favorables disparaissent devant la contraction du crédit, des flux financiers et des transferts des migrants.

Si à ce cas de figure, on ajoute la hausse et le durcissement des termes de contraction des crédits, nous pourrions être en présence d’une situation potentiellement explosive en terme de dette externe et de ses impacts.

Autant l’augmentation des taux d’intérêt liés à la dette externe, que le niveau parfois encore plus élevé des taux d’intérêts internes, accentuent la crise.

Alors que les pays créanciers se renferment sur eux même pour chercher des solutions protectionnistes et régionales aux obstacles que son génie financier virtuel a créé pour le développement, le monde sous développé se retrouvera encore plus pauvre et plus inégalitaire. C’est à ce moment précis, qu’il sera indispensable de tirer profit des opportunités d’intégration régionale qui se présenteront.

Ceci est réellement l’unique solution immédiate aux problèmes de la chute des flux financiers et de détérioration des termes de l’échange qui se profilent. Dans le cas de la dette, aujourd’hui plus que jamais, il est impératif de reporter ou d’annuler le paiement de ces montants irrationnels de flux qui sous forme de paiement d’intérêts, saigneront encore plus les pays en développement.

Pour répondre à la question que se posent aujourd’hui de nombreux politiciens et acteurs en relation avec la dette des pays en développement, on peut affirmer qu’il sera impossible d’éviter une nouvelle crise de la dette dans un délai de cinq à dix ans.

Article original sur http://www.cadtm.org/spip.php?article4585 ·


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