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Europe

L’« autre » Europe persiste et signe

Jeudi 9 juin 2005, par Gustave MASSIAH

Les Français ont dit non massivement. Les Néerlandais de même. Les altermondialistes qui ont eu un succès immense à soulever le débat n’ont pas ignoré les risques de faire franchir un seuil à la crise européenne et de renforcer les forces centrifuges existantes. Et aussi de renforcer les tendances nationalistes dans nos sociétés. Mais ils ont jugé que les risques d’accentuer une dérive de l’Europe vers des positions néolibérales et atlantistes étaient plus graves. Cette évolution est engagée depuis 1979 avec le passage à la phase néolibérale de la mondialisation, confirmée par l’Acte unique de 1986 et accélérée par la conduite de l’élargissement. Le risque de cette dérive est de couper encore plus les peuples de l’idée européenne et de la construction de l’Europe.

Enfin un débat

Les électeurs ont rejeté le traité constitutionnel et sa philosophie néolibérale, dont une majorité des électeurs de gauche traditionnels ((71 % des ouvriers, 66 % des employés). Les positions nationalistes et d’extrême droite ont été minorisées même si elles restent présentes et dangereuses dans l’ensemble de l’opinion (questions de l’immigration et de la Turquie). Les altermondialistes ont refusé d’être enfermés dans le dilemme pour ou contre l’Europe en affirmant leur volonté de construire une autre Europe. En fait, le débat a largement porté sur les réformes néolibérales organisant l’injustice sociale et renforçant les inégalités. Le refus des électeurs a été le refus de ces réformes, en même temps que celui d’une certaine « classe politique » et des « élites ». En cela la mobilisation en France prolonge la vague des mouvements de 1994 et 1995 qui avaient en Italie, en France et en Allemagne, marqué un coup d’arrêt des remises en cause des systèmes de protection sociale, la prise de conscience des politiques de précarisation et l’émergence d’une nouvelle phase de l’altermondialisation.

Le roi est nu

Le non des masses révèle la crise de l’Europe, malmené par ses élites qui voient l’européanisation ou l’harmonisation comme un moyen pour attaquer les acquis sociaux, une sorte de dumping social et fiscal. Parallèlement, l’Europe officielle choisit l’ancrage géopolitique dans le bloc dominant sous hégémonie américaine. On vient de le voir avec l’« acceptation » par l’Europe de Paul Wolfowitz (chef des néoconservateurs américains) à la Banque mondiale en « échange » de la nomination du très néolibéral français Lamy à la tête de l’OMC. À cette Europe-Là, on dit non. Maintenant que le travail a été fait, il nous revient de participer à la définition avec les peuples européens, avec les peuples du monde, d’une Europe solidaire, démocratique, sociale, écologique, indépendante et internationaliste.


Gustave Massiah co-préside le CÉDÉTIM et l’Initiative pour un autre monde (IPAM) à Paris.