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En attendant le sacre de Tandja Ier

Mercredi 5 août 2009, par Alain Saint Robespierre

Le 4 août 2009, les Nigériens se rendront aux urnes pour un référendum sur l’avènement éventuel d’une VIe République. Cette révision constitutionnelle n’a pour objectif que de maintenir le président Tandja au pouvoir au-delà de l’échéance prévue par l’actuelle loi fondamentale. L’Observateur Paalga, quotidien burkinabé, vitupère contre ce énième exemple d’autocratie africaine.

30.07.2009 | L’Observateur Paalga


Une affiche défend le oui au référendum, Niamey, 1er août 2009

© AFP

"Puisque la présente loi ne nous le permet pas, alors nous la changerons par une autre, comme nous l’autorisent les prérogatives présidentielles", se sont, opportunément et cyniquement, prévalus les Tazartchés [défenseurs du troisième mandat], les enragés de la cause de la prolongation. Ainsi donc naquit un nouveau corpus constitutionnel, fruit de l’esprit machiavélique des nègres de service de l’homme fort de Niamey. Quelle forme d’organisation du pouvoir politique consacre cette nouvelle Constitution ? De jure, un régime présidentiel, mais, de facto, un système présidentialiste, si ce n’est l’absolutisme tsariste. En un mot comme en mille, un recul démocratique.

Jugez-en vous-même. Dans sa version finale, le projet de Constitution stipule que le président de la République est à la fois chef du gouvernement, chef de l’administration, chef suprême des armées et chef du Conseil supérieur de la magistrature. Alors que la loi fondamentale actuelle, bientôt caduque, confère au président la fonction de chef de l’Etat, et au Premier ministre celle de chef du gouvernement. Une sorte d’exécutif bicéphale, souci de diversification des canaux du pouvoir.

La clause limitative du nombre de mandats présidentiels [deux mandats maximum] est désormais une disposition digne d’un musée, estiment les concepteurs du nouveau texte de loi. Comble d’iniquité, le projet de Constitution prévoit, noir sur blanc, la prolongation de trois ans du mandat de Mamadou Tandja. En son article 154, il précise : "Le président de la République en exercice reste en fonction jusqu’à l’élection présidentielle qui aura lieu en décembre 2012. Cet article ne peut faire l’objet d’une révision". (sic)

On se croirait à l’époque de la Russie tsariste. Comme on peut le constater, la VIe République réclamée à cor et à cri par cette meute de Tazartchés chauffés à blanc par des marchands d’illusions, cette République-là n’est rien d’autre qu’une mise en coupe réglée d’une démocratie qui avait pourtant valeur d’exemple dans une Afrique peu permissive aux valeurs républicaines. Elle marque le retour du pays du Ténéré à la conception nabale, cette africânerie qui veut que, sous nos cieux, le pouvoir ne supporte point le partage. Un état de fait entretenu par des roitelets avec la complicité d’une horde d’intellectuels dévots. C’est la réalité politique qui prévaut au Togo, au Cameroun, au Gabon, dans les deux Congo, et au Burkina Faso, où la seule évocation du mot "alternance" vaut subversion et apporte son lot de conséquences.

Que Mamadou Tandja et ses Raspoutine du Sahel arrêtent de nous traumatiser le tympan avec des incantations du genre : "Trois ans de prolongation pour achever des chantiers." Achever des chantiers dans un pays comme le Niger, pays pauvre parmi les plus pauvres de la planète, est un leurre qui ne trompe personne.

De même, qu’ils arrêtent de raconter des fables comme "c’est le peuple qui décidera". Lorsque, par ambition personnelle, on en vient à renvoyer sans ménagement des députés, représentant justement le peuple, à dissoudre un Conseil constitutionnel, symbole à haute valeur républicaine, à prendre des décrets scélérats qui menacent la liberté de la presse… bref, quand on atteint ce degré d’autoritarisme, c’est que le peuple, on s’en soucie comme d’une guigne. Le tsar Tandja Ier arrive ; prière de s’incliner sur son passage !


Voir en ligne : http://www.courrierinternational.co...