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ISRAEL - PALESTINE

Des esclaves liés au maître : les Israéliens et la venue du président Bush

Lundi 14 janvier 2008, par Michel Warschawski

Il n’y a qu’en Israël où George Bush est traité avec dignité et respect.
Il n’y a qu’ici que les gens sont prêts à ramper devant lui.

En apparence, il n’y a aucune raison politique à la venue du président US en Israël et à son séjour prolongé dans le pays. En dehors de l’occasion de faire des photos d’Ehud Olmert et Mahmoud Abbas, le président US n’a rien apporté, et ne pouvait rien apporter, à un processus politique véritable, quel qu’il soit. Personne ne prend George Bush au sérieux, y compris les citoyens de son propre pays, ni la majorité de son propre parti politique où ceux qui sont « proches » de lui comptent avec anxiété les jours qui restent à le souffrir au pouvoir.

Peut-être est-ce là l’unique raison de sa venue en Israël : il n’y a qu’en Israël où George Bush est traité avec dignité et respect. Il n’y a qu’ici où les gens sont prêts à ramper devant lui. Pas seulement les officiels du gouvernement, tels Olmert, Livni ou Netanyahu, mais aussi le citoyen moyen. A part les chauffeurs de taxi qui se plaignent amèrement - et à juste titre - du bouclage partiel imposé sur Jérusalem, les habitants de la cité ont accepté affectueusement d’être si souvent harcelés à cause de notre visiteur. Débordant de fierté que le chef du monde libre les honore de sa présence, les gens d’Israël ont suivi de près chaque étape et chaque déclaration du président US, s’excitant à la moindre bêtise qu’il pouvait raconter.

Pour une fois, je souscris totalement à ce qu’a écrit, dans le quotidien Ha’aretz, le commentateur de droite, Israel Harel : « Bush est un homme d’Etat naïf, et pas seulement dans notre arène. C’est un idéaliste américain de l’ancien style ; quand il éprouve un sentiment de justice et se sent investi d’une mission, il peut se comporter d’une façon pas spécialement aimable, même envers ses amis. Mais il n’est pas avec nous comme un seigneur féodal, et ce n’est pas sa faute si certains d’entre nous se sont comportés comme des Juifs dans un shtetl *, quand le seigneur vient leur rendre visite. Des dizaines d’émissions n’ont été que verbiage sans intérêt, avec des querelles gênantes à propos d’invitation à des manifestations ouvertes à des invités, de la fermeture de Jérusalem... » (Ha’aretz, 10 janvier)

Gênantes en effet. A quoi cela fait-il penser ? A un garçon qui dépend totalement de son riche tonton d’Amérique. Avec le temps, le garçon a grandi, il est devenu riche et fort, mais il a du mal à couper les ponts avec son oncle : c’est seulement dans la compagnie de celui-ci qu’il se sent en sécurité. Il est incapable de se sevrer lui-même d’une dépendance affective, même quand ses voisins montrent leur volonté d’engager des relations amicales et normalisées.

Le Livre de l’Exode, dans la bible, relate l’histoire de l’esclave lié à son maître, de cet esclave qui doit normalement être libéré mais qui refuse de partir, disant « j’aime mon Maître ». La bible se réfère négativement à un esclave qui préfère l’esclavage à la liberté, la domination au rachat. Cependant, il semble que malgré les aspirations du sionisme originel, le « nouveau Juif » soit incapable de surmonter son besoin de s’accrocher au seigneur. Quant au seigneur, il est délaissé depuis longtemps par la majorité de ses sujets et partisans, et il s’accroche à son esclave comme à un témoignage ultime de sa gloire passée.

*) Petite ville, grand « village » (dorf en yiddish) ou quartier juif en Europe de l’Est avant la Seconde Guerre mondiale.


Voir en ligne : www.alternativenews.org